1 an après : “Pourquoi je ne m’oppose (toujours) pas au Black Friday”

Notre point de vue sans filtre sur le Black Friday cette année, par Laure Bouguen, la fondatrice de HO KARAN.

Notre point de vue sans filtre sur le Black Friday cette année, par Laure Bouguen, la fondatrice de HO KARAN.

L’année dernière j’avais rédigé un billet d’humeur : “pourquoi je ne m’oppose pas au Black Friday ?”

Nous étions en 2021, le ecommerce français était globalement en bonne santé, et pour la 2ème année consécutive les pro-Black Friday (pas toujours assumés) et les anti-Black Friday (parés de leur plus belle cape green) s’affrontaient.

Des collectifs d’entreprises nées sur le web avaient vu le jour : Green Friday, Black For Good, et chacun tentait de faire montre de vertu en criant à qui voulait l’entendre “nous sommes contre les promos, contre la surconsommation, contre le Black Friday”.


La publicité, un angle mort des politiques RSE des entreprises

Ces postures dogmatiques me gênaient car elles me semblaient à géométrie, ou plutôt dates variables. La question que je me posais : Comment était-il possible de dépenser jusqu’à 40% de son chiffre d’affaires en publicités et promotions - sur Google et Meta - 364 jours par an, et s’indigner du Black Friday ?

Après avoir entamé le processus pour certifier HO KARAN Bcorp, le nouveau label RSE à la mode, je m’étais rendue compte d’un angle mort majeur : les dépenses publicitaires et promotionnelles (typiquement vendre constamment en soldes) n’étaient jamais remises en question. Le choix du fournisseur d’énergie pour les bureaux était plus important que la mesure des dépenses uniquement destinées à stimuler l’acrasie chez les consommateurs, cet étrange paradoxe que les addicts connaissent bien, celui d’agir à l’encontre de son meilleur jugement, de vouloir une chose (une planète préservée, des dépenses raisonnées), mais de faire son contraire (surconsommer par exemple).


Mon souhait : intégrer dans les calculs de performance sociale environnementale le % du chiffre d’affaires dédié la publicité et aux promotions

L’objectif est de donner aux consommateurs plus de transparence sur la décomposition du coût des produits qu’ils achètent… et des systèmes qu’ils alimentent, sans le savoir.

Les plus grands retailers français de la beauté vendent la grande majorité des parfums et produits de soins à -25% et plus toute l’année. Les grandes marques de mode basent jusqu’à 50% de leur chiffre d’affaires sur les périodes de soldes. Les réductions n’ont donc plus de sens, elles sont désormais intégrées par les marques dans le prix de départ des produits pour faire croire ensuite au client qu’il bénéficie d’un avantage.

Dans mon article j’avais partagé le détail de nos dépenses publicitaires et promotionnelles par pôles marketing : publicité directe (google ads, insta ads…), publicité indirecte (rédactionnel, blog, podcast…) et promotions et incitations à l’achat (réductions sur les produits, produits offerts…). Cette nomenclature imparfaite avait pour ambition de lancer une discussion et d’interpeller les parties prenantes tels que BCorp ou 1% for the planet dans cette réflexion.

Suite à mon article, plusieurs acteurs, majoritairement des consultants et TPE, s’étaient mobilisés en faveur de la création de cet outil. Mais pour qu’il ait du poids, il faut que les puissances économiques et politiques - ceux qui sont capables d’influer sur les politiques de régulation - s’en saisissent, et ça ne semble malheureusement pas être leur priorité actuellement. Parce que l’action est sœur du rêve (Jacques Blamont), je continuerai chaque année à vous partager nos chiffres.


Qu’en est-il de nos actions publicitaires et promotionnelles en 2022 ?

Globalement cette année nous avons beaucoup moins dépensé en influence sur les réseaux sociaux et beaucoup plus en promotions et réductions auprès de nos consommateurs.

J’ai pendant longtemps était très réfractaire à proposer des réductions sur nos produits. Les promotions continuelles que j’observe actuellement me questionnent sur la valeur perçue des produits et des marques autant que sur la pérennité de notre économie. Sachez que quand nous faisons une offre commerciale c’est un véritable effort sur notre marge. Certaines marques ont plus de capacité à afficher des réductions, mais qu’en est-il de la justesse du prix initial ? Je préfère de mon côté apporter de la valeur à nos clients avec des collaborations ou des contenus inédits comme La Grande Etude du Stress que nous sortons dans quelques jours.

 

Qu’en est-il de nos actions publicitaires et promotionnelles en 2022 ?

Globalement cette année nous avons beaucoup moins dépensé en influence sur les réseaux sociaux et beaucoup plus en promotions et réductions auprès de nos consommateurs.

J’ai pendant longtemps était très réfractaire à proposer des réductions sur nos produits. Les promotions continuelles que j’observe actuellement me questionnent sur la valeur perçue des produits et des marques autant que sur la pérennité de notre économie. Sachez que quand nous faisons une offre commerciale c’est un véritable effort sur notre marge. Certaines marques ont plus de capacité à afficher des réductions, mais qu’en est-il de la justesse du prix initial ? Je préfère de mon côté apporter de la valeur à nos clients avec des collaborations ou des contenus inédits comme La Grande Etude du Stress que nous sortons dans quelques jours.


Pourquoi le Black Friday n’est plus autant décrié cette année ?

Il y a quelques semaines j’ai voulu mobiliser des entreprises similaires à la mienne sur l’utilisation de cet outil de partage des dépenses publicitaires et promotionnelles, sans succès. La vérité, c’est que le Black Friday et la course promotionnelle ont commencé en septembre, et que solder est devenu pour beaucoup une question de survie. Comme moi vous recevez sûrement depuis la rentrée des textos et emails mentionnant des “outlet”, “braderie”, “last chance” de la part des marques que vous suivez de l’habillement, à la cosmétique en passant par la décoration. Les démarques affichées vont de -20% à -60% et ne se limitent plus aux périodes de soldes ou au fameux vendredi noir.

Pourquoi tant de promotions ? Parce que l’année 2022 est très compliquée pour beaucoup de ecommerçants pour des raisons multifactorielles, avec notamment :

  • l’annonce de la guerre en Ukraine qui a fait chuter les ventes sur internet dès février
  • les coûts d’acquisition sur Meta (Facebook et instagram) qui ont explosé - à blâmer d’après certains : la RGPD, l’escalade publicitaire entre les marques et la baisse tendancielle de son efficacité -
  • la frilosité des consommateurs face à l’inflation

L’avenir est très incertain pour beaucoup de marques et entreprises digitales, et la question pour elles n’est plus de savoir si une promotion pour le Black Friday est moralement souhaitable ou non, mais s’il est possible de piloter un eshop autrement qu’avec des promotions agressives et continuelles.


La solidarité, notre réponse à un contexte difficile

Si nos dépenses publicitaires sont passées de l’influence aux promotions cette année c’est parce que nous avons bien conscience que la situation économique est compliquée pour nos clients. Le président Emmanuel Macron a fait peur aux Français en disant que l’abondance était finie, et cette phrase choc est rentrée jusque dans la tête des plus aisés. Beaucoup attendent désormais une offre commerciale pour les achats de non première nécessité. Je comprends ce besoin et c’est pourquoi je ne veux pas rentrer dans une polémique pour ou contre le Black Friday. C’est un indicateur d’une réalité économique, et plutôt que de le critiquer ou de l’encenser, j’aimerais utiliser cet événement de masse pour mettre en avant des marques positives et responsables, qui défendent le savoir-faire français, l’entrepreneuriat féminin et qui tentent de faire changer les choses à travers des produits durables et qualitatifs. Nous avons réfléchi avec eux à la meilleure manière de parler de consommer autrement, avec légèreté et sans culpabiliser.

C’est pourquoi nous nous sommes associées à DLab, la marque de complément alimentaire créée par Fleur Phelipeau, une fantastique entrepreneuse qui a ouvert cette année sa propre usine, avec pour ambition de réindustrialiser la France par le beau. Nous vous préparons une surprise avec Le Slip Français, qui a pour ambition de relocaliser la filière du textile en France, propose une incroyable gamme de sous-vêtements en chanvre français et lance sa campagne d’investissement citoyen sur Lita. Mais aussi la marque Hopaal qui promeut le consommer moins mais mieux en mettant l’accent sur la durabilité de ses produits.

 

Que ce vendredi soit noir, vert, ou bleu blanc rouge, on souhaiterait avant tout qu’il soit solidaire, avec vous, dont le pouvoir d’achat est mis à mal par le contexte macroéconomique, et avec les marques et entreprises françaises qui ont à coeur de bien faire.

 

Par Laure Bouguen, fondatrice de HO KARAN


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